L’agroécologie est aujourd’hui reconnue comme une voie essentielle pour le changement de notre modèle agricole et alimentaire. En préservant ou en restaurant la fertilité des sols par des pratiques de couverture végétale et de limitation du travail du sol, l’agriculteur produit des services écosystémiques variés : production durable de nourriture, conservation d’un habitat pour la biodiversité, recyclage des résidus végétaux et animaux, rétention et dégradation des polluants pour maintenir la qualité de l’eau, régulation du climat et lutte contre le dérèglement climatique. Retour sur l’expérience de couverture végétale en cours d’Adrien Harter et Félix Meyer, houblonniers impliqués dans le projet AgroHoublon.
« J’ai procédé à un essai de couverture permanente du sol de la houblonnière. Contrairement à nos habitudes, je souhaite mettre en place une couverture permanente dans l’inter-rang pour améliorer la structure et l’activité biologique du sol et favoriser la biodiversité. En créant un nouveau microclimat au sein de la houblonnière, j’espère réduire mon utilisation d’intrants et notamment de produits phytosanitaires. J’ai ainsi opté pour la mise en place de 2 couverts végétaux temporaires : un couvert estival, en période de végétation du houblon ; et un couvert hivernal, pendant la phase de repos végétatif du houblon. Et cette année, au printemps, j’ai donc commencé à pailler entièrement la houblonnière. J’envisage également de ne plus tailler mes souches. » Adrien Harter
« Mon objectif est de mettre en place une couverture permanente du sol grâce, non pas à des couverts de plantes annuelles répétés, mais plutôt à partir de couverts de plantes biennales. Dans ce couvert biennal multi-espèce implanté à l’automne, je souhaiterai avoir des espèces annuelles capables de produire une biomasse importante rapidement, ainsi que des plantes biennales. Au printemps suivant l’implantation, j’imagine faucher ou broyer le couvert pour créer un léger paillage sur le sol, principalement composé des plantes annuelles. Alors les plantes biennales se développeront à travers ce paillage et prendront le relais des plantes annuelles. Cette nouvelle biomasse produite pendant la période printanière-estivale sera gérée par fauche ou broyage pour toujours conserver un paillage dans l’inter-rang.
Auparavant, j’aimerais observer l’effet du paillage sur le houblon. Cette année, j’ai donc mis de la paille uniquement dans l’inter-rang, après la mise en place des fils. Je compte, après un premier défanage, mettre de la paille sur le rang de houblon cette fois.
En réduisant, voire en supprimant, le travail du sol par la mise en place d’une culture de couverture, je souhaite réduire la main d’œuvre et le temps de travail dans les houblonnières, améliorer les propriétés de mon sol, favoriser la biodiversité, contribuer à l’embellissement de la campagne alsacienne et, par la même occasion, à redorer l’image du métier d’agriculteur auprès des citoyens ! » Félix Meyer
Échanges et partage d’expériences : le soutien d’un groupe motivé
« Les incertitudes sont certes nombreuses, mais nos expérimentations seront, sans aucun doute, riches d’enseignements. Nous sommes, par exemple, curieux d’observer le comportement du houblon à proximité d’autres espèces végétales, ainsi que l’évolution de la pression maladies en présence de couverts ou de paille. Mais, dans le cadre du projet AgroHoublon, nous formons un groupe motivé ; nous échangeons beaucoup et partageons nos observations, nos pratiques. C’est plus rassurant d’avancer à plusieurs ! » Adrien Harter
« Même si les surfaces sont limitées, le risque de diminution de rendement, principalement, est bien présent d’où l’intérêt de participer à ce projet et d’avoir un partenaire financier, en l’occurrence la Fondation d’entreprise Kronenbourg. » Félix Meyer
Premières observations
« Les résultats des essais que nous menons s’observent dans le temps ; ils ne seront visibles pour la plupart qu’après un certain nombre de répétition de la ou des pratiques au fil des années. Cependant, sous la paille, la terre est encore fraîche et nous pouvons y observer des vers de terre alors que dans les autres houblonnières, sans paillage, le sol s’est pris en masse et est très sec suite à ce début de printemps sans précipitations. Il ne s’agit, toutefois, que des premières observations et nous ne pouvons évidemment pas en tirer de conclusions pour l’instant. » Adrien Harter
« Difficile d’observer des effets en si peu de temps de mise en place, mais il est certain que le sol conserve davantage son humidité sous la paille. » Félix Meyer